Le Graal, hier et aujourd'hui
Quand j'ai commencé à écrire ce post, il avait pris une dimension tout à fait différente. Et au fur et à mesure que mes idées se sont
mises en place, j'ai réalisé que je partais vers toute autre chose. Bref, une petite réorganisation s'imposait afin de rendre l'article un peu plus clair et cohérent. La question que je me suis
posée est simple mais les réponses sont diverses: qu'est-ce qui a fait que le Graal a subit une telle évolution? Et je ne parle pas de l'évolution en tant que telle mais sur les phénomènes qui
ont abouti à cette évolution. Les éléments qui suivent ne sont que des pistes de réflexions possibles et ne sont pas des réponses définitives, si tant est qu'il y en ait.
Le Graal, c'est quoi? C'est une question que l'on s'est déjà posé de nombreuses fois sur ce blog. Le fait est que la problématique est vaste vu qu'il peut être tout et n'importe quoi. Et nous ne
reviendrons pas sur ses diverses formes, je laisse aux lecteurs de ce blog la liberté d'aller piocher dans les autres articles de ce blog. On peut cependant réussir à "simplifier" le Graal en
dégageant trois aspects qui découlent de l'étymologie même du mot:
1) le graal viendrait de "gradale" qui signifie plat ou asssiette, tel que décrit par Chrétien de Troyes. La forme ronde de l'assiette nous ramène à l'accomplissement de la
quête. Toujours chez Chrétien de Troyes, le voyage de Perceval peut se concevoir comme un cercle dessinant les divers étapes que le héros doit endurer avant d'accéder à l'objet sacré.
2) d'où l'idée de gradation (ou degré) qui a découlé du mot "gradale". On sait que le plat décrit par Chrétien servait à découper la viande en divers morceaux. Un tout nouveau
sens se forme alors, en plus de la quête elle-même, c'est l'échelle de valeur qu'intégrera un chevalier qui le transformera en être pur ou en élu pour lui permettre finalement d'atteindre le
Graal.
3) par extension, "gradale" a donné "cratale". La forme même du cratère rappelle celle du vase. De là, le vase a été rapproché de l'utérus féminin (un autre "contenant"), d'où
les divers mythes de fertilité qui en ont découlé et les études sur le Roi Pêcheur.
De nos jours, le concept du Graal est devenu plus flou. De Graal, on est passé à graal (l'absence de majuscule est importante!!!). Cette différence dans l'orthographe est essentielle
car elle a en quelque sorte banalisé le graal. Pour certains, ce sera l'achat d'une nouvelle voiture, pour d'autres la réussite d'un concours universitaire. Le nom "graal" a servi
à la dénomination de groupements ou d'associations ou même à des restaurants et des cafés. Les mythes sur la fertilité ont été poussé à l'extrème quand on a rapproché le Graal de la recherche du
point G dans le plaisir sexuel.
En fait, on ne recherche plus tant le graal car on sait qu'il est à portée de main. Ce sont les efforts que l'on consacre à son obtention qui sont les plus importants. Bref,
c'est la quête qui passe avant l'objet de la quête. Il est difficile de définir le pourquoi du comment mais on peut juste donner quelques pistes de réflexion:
1) le Graal a été associé à la coupe du Christ, donc mis en avant du côté religieux. La mort de Dieu, significative après la création de la psychanalyse à la fin de XIXème
siècle, a pu contribuer à l'érosion progressive du Graal en tant que coupe du Christ ou encore en tant qu'objet sacré.
2) le développement de la science a balayé les mythes tels qu'ils étaient perçus au Moyen-Age.
3) la suprexposition des mythes arthuriens, aussi bien dans la littérature qu'à la télévision ou au cinéma, a eu un impact sur la sacralisation de l'objet. Des films comme celui
des Monthy Python ont participé à démystifier l'objet sacré.
Bref, paradoxalement au fait que les mythes arthuriens sont toujours la base dans laquelle écrivains, scénaristes et autres auteurs viennent puiser inlassablement en quête d'inspiration, il y a
en même temps un effet doppelganger qui aurait tendance à démystifier toute la légende.
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